Quelle politique pour les territoires oubliés de la République ? - L'Humanité (2024)

Les intervenants

  • Sébastien Vincini, président PS du conseil départemental de Haute-Garonne
  • Emeline K/Bidi, députée GDR à La Réunion
  • Jean-Philippe Gautrais, maire PCF de Fontenay-sous-Bois
  • Yannick Monnet, député PCF de l’Allier
  • Sébastien Vincini, président PS du conseil départemental de Haute-Garonne
  • Emeline K/Bidi, députée GDR à La Réunion
  • Jean-Philippe Gautrais, maire PCF de Fontenay-sous-Bois
  • Yannick Monnet, député PCF de l’Allier
  • Sébastien Vincini, président PS du conseil départemental de Haute-Garonne
  • Emeline K/Bidi, députée GDR à La Réunion
  • Jean-Philippe Gautrais, maire PCF de Fontenay-sous-Bois
  • Yannick Monnet, député PCF de l’Allier

Vivre dans des territoires ruraux, en banlieue ou en outre-mer, c’est, au-delà des différences, être confronté au démantèlement des services publics et à une rupture d’égalité. Une rencontre sur le thème «Quelle politique pour les territoires oubliés de la République?» s’est tenue à l’Agora de la Fête de l’Humanité.

Emeline K/Bidi, députée GDR à La Réunion, Yannick Monnet, député PCF de l’Allier, Jean-Philippe Gautrais, maire PCF de Fontenay-sous-Bois, et Sébastien Vincini, président PS du conseil départemental de Haute-Garonne, ont partagé leurs expériences d’élus de ces territoires oubliés.

À quels problèmes de manque de services publics vos territoires sont-ils confrontés?

SébastienVincini: Le modèle républicain est en train d’être démantelé. Il y a une vision libérale de l’aménagement du territoire, de l’organisation des services publics et une marchandisation de ce qui était des biens communs. Cela se traduit par la désertification médicale, l’appauvrissement des services publics et l’absence d’accès aux droits sur un certain nombre de territoires.

Cela s’est accéléré sous Emmanuel Macron, avec sa vision de développer les grandes métropoles pour qu’elles ruissellent dans les territoires. Mais ça ne marche pas. Cela crée un sentiment d’abandon et d’injustice. Ça met à mal le consentement républicain à l’impôt, comme le sentiment d’appartenir à une même République qui offrirait l’égalité des chances par les services publics, l’école républicaine, et un égal accès aux soins.À la place d’une réponse universelle sur le territoire, il y a des fermetures là où ce n’est plus rentable, qui produisent une rupture d’égalité. Renouer avec l’esprit de la République, c’est redonner force à cette promesse d’égalité.

Les socialistes disaient: «Le service public, c’est le patrimoine de ceux qui n’en ont pas.» Mais ça revient à dire que le service public serait juste pour les pauvres. Les sociaux-démocrates ont porté cette vision, et c’est une erreur. Le service public, c’est le patrimoine de tout le monde. Ça doit être l’excellence pour tous, quel que soit le territoire.

Emeline K/Bidi: Les territoires d’outre-mer sont divers, donc il est compliqué de dire qu’ils se sentent uniformément abandonnés. Mais ce qui est particulièrement problématique aujourd’hui, c’est ladématérialisation et la concentration croissantes des services publics. Les services des Trésor public, par exemple, ferment pour se concentrer dans les grandes villes, ce qui les éloigne de la population.

On renvoie les gens vers Internet, maisdans ces départements, 30% de la populationont detrès grandes difficultésenlecture. Ce recul accentue la fracture entre les habitants et les services publics. Un autre facteur est le sentiment qu’ont les Ultramarins de ne pas êtreassociésauxservices publics parce que les postes de fonctionnaires sont occupés par d’autres.

C’est particulièrement vrai pour les postes à responsabilités. À La Réunion, seulement 11% des postes d’encadrement de la fonction publique sont occupés par des Réunionnais. Cela suscite un sentiment d’éloignement et ne permet pas d’avoir des services publics qui répondent aux besoins, puisque les fonctionnaires ne connaissent ni le territoire, ni sa langue, ni sa culture.

Jean-Philippe Gautrais: Ce qui fait le lien entre l’ensemble de nos territoires, c’est la remise en cause du service public. Il y a une ultralibéralisation et une conception qui consistent en permanence à se demander comment le service public peut servir le marché, au lieu de le voir comme un outil de la lutte contre les inégalités.

En termes d’aménagement du territoire, la France des métropoles ne fonctionne pas. Se concentrer sur elle pose des problèmes, aux banlieues, comme à la ruralité. Il faut donc repenser l’aménagement pour qu’il soit au service d’un développement équilibré et de la cohésion sociale et territoriale.

Ni les financements, ni les politiques publiques de lutte contre l’inégalité ne sont là, dans tous les domaines régaliens, école, police, santé. On a besoin de plus d’argent et de plus de services là où il y a des inégalités. Il faut changer de modèle et rompre avec la logique libérale.

Yannick Monnet: La relégation est plus qu’un sentiment. Dans un certain nombre de territoires, c’est une réalité. Chaque fois qu’un service public diminue, c’est l’État qui recule. Et quand l’État recul, ce qui reste, c’est le pire politiquement. La relégation, c’est par exemple la carte scolaire.

Cette année, on a supprimé des classes, voire fermé des écoles dans des territoires ruraux et renvoyé des enfants sur la route. C’est un traumatisme. Deuxième exemple, les trésoreries. On les ferme, mais ça a un coût, parce que ça veut dire que, quand une commune émet un mandat pour faire des travaux, l’entreprise est payée avec deux à trois mois de retard.

Notre pays est rural, mais il y a une pensée urbaine qui guide la vision d’ensemble, et les territoires ruraux ne sont envisagés que par rapport aux métropoles. C’est très mal vécu par les habitants. Il y a une bataille politique à mener pour que l’État reprenne pied dans nos territoires.

Jean-Philippe Gautrais: La santé est un bon exemple de ce qui ne fonctionne pas dans la pensée libérale. Aujourd’hui, nous avons des centres de santé à Fontenay, mais ils ne sont pas pris en compte par l’ARS et pas financés par l’État. Or, pendant le Covid, ce sont eux qui ont assuré la continuité du service de santé et, surtout, à défaut de l’État, l’organisation de la prise en charge de la crise. Pourtant, on observe une volonté de s’attaquer aux collectivités territoriales, alors qu’elles sont un des maillons structurants de l’aménagement du territoire.

Quelle politique pour les territoires oubliés de la République ? - L'Humanité (2024)
Top Articles
Latest Posts
Recommended Articles
Article information

Author: Arline Emard IV

Last Updated:

Views: 5954

Rating: 4.1 / 5 (52 voted)

Reviews: 83% of readers found this page helpful

Author information

Name: Arline Emard IV

Birthday: 1996-07-10

Address: 8912 Hintz Shore, West Louie, AZ 69363-0747

Phone: +13454700762376

Job: Administration Technician

Hobby: Paintball, Horseback riding, Cycling, Running, Macrame, Playing musical instruments, Soapmaking

Introduction: My name is Arline Emard IV, I am a cheerful, gorgeous, colorful, joyous, excited, super, inquisitive person who loves writing and wants to share my knowledge and understanding with you.